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Utilisateur:Michel

De Wikidebrouillard.

Sommaire

Michel Vancassel

Chercheur CNRS honoraire (Ethologiste et Evolutionniste).

Associations:

  • Association des Petits Débrouillards Bretagne (APDB)
  • Fondation Sciences Citoyennes
  • Association française pour le Mouvement Universel de la Responsabilité Scientifique (MURS)
  • Société française pour l'étude du comportement animal (SFECA)

Pourquoi cette page ?

De ma retraite bretonne, cette page constitue avant tout un lien avec les "petits débrouillards". Depuis une bonne dizaine d'années maintenant je partage avec eux le souci de développer, voire d'inventer, les pratiques et les instruments qui peuvent aider les citoyens ouverts à la science (ce qui m'aide à rester un scientifique-citoyen). Le wiki-débrouillard est un de ces outils. Naturellement c'est aux animateurs et militants, dans leur "effort de culture scientifique" que je pensais d'abord (voir le texte "à la découverte de la culture scientifique") mais les visiteurs de cette page sont assez nombreux pour imaginer qu'elle peut intéresser bien au delà.

Ceci m'encourage à poursuivre et explique les textes suivants écrits "de fil en aiguille" selon mes lectures et mes discussions avec les uns ou les autres, amis ou inconnus (science et morale par exemple).

Ces textes sont autant de bouteilles à la mer, et vos réactions interrogatives ou critiques permettent de les améliorer, les enrichir et les rendre plus vivants et accessibles. Les pages "discussion" associées à chaque texte vous sont ouvertes. Comme le dit notre logo, poser une question est toujours un plus !


A la découverte de la culture scientifique (2006)

La culture scientifique, ce qu'elle n'est pas et ce qu'elle pourrait devenir: Présentation d'auteurs et de textes incontournables sur la question (PDF à télécharger).

De fil en aiguille

Sur nos difficultés à comprendre la science (juin 2012)

Nouvelle page de discussion autour de la médiation scientifique vue par les "petits débrouillards" et avec les travaux des psychologues des sciences, didacticiens, etc. Ce que tout animateur scientifique doit connaître. Savoirs naïfs et savoirs scolaires

Question pour une (re)médiation scientifique.

Homo sapiens, un singe comme les autres ?

==Avant propos==

"L'année Darwin" (2009) a été pour beaucoup de médiateurs scientifiques et nous "petits débrouillards" une belle année de mutualisation autour du darwinisme et de la théorie de l'évolution. Pourtant l'attention portée à la critique du créationnisme a pu favoriser une présentation "politiquement correcte" et quelque peu momifiée de l'évolutionnisme actuel avec l'oubli des discussions internes et des nouveautés qui s'y agitent: évo-dévo, construction de niche, ... (1). Le thème du "propre de l'homme" est-il exemplaire de cette présentation biaisée de la recherche actuelle ? Son effondrement annoncé, à la manière d'un château de sable miné par le flux des découvertes éthologiques et paléontologiques, correspond-il à une réalité ? (2)

Des rencontres avec des  collègues en activité, puis des lectures comme celle du dernier livre de Michel Morange (3),  la publication récente de plusieurs études de paléontologues, éthologistes et psychologues ont fini par me convaincre que ce thème du propre de l'homme et la question de son émergence restent des plus féconds pour de nombreuses disciplines. Enfin la recherche continue ("association des  petits débrouillards" oblige !)  d'une   médiation scientifique différente  d'une  simple communication d'experts  face à des auditoires captivés  (mais captifs et peu critiques)  m'a incité à écrire  et  exposer la proposition de (re)médiation scientifique qui suit.   

Ce texte a servi de support à une présentation publique ce début juillet 2012. Je le dédie à mes auditeurs et tout spécialement à ce Monsieur, déçu de ne pas m'avoir entendu présenter et discuter la "bipédie". Je mesure combien ma réponse sur le délaissement actuel de ce propre de l'homme, à l'honneur il n'y pas si longtemps, a pu lui paraître insuffisante. Il m'a convaincu qu'on pourra toujours faire mieux en matière de (re)médiation scientifique ! (1) Mais voir la conférence de Jean Gayon "Théorie de l'évolution et créationnisme" sur canal-u-tv et, sur l'enseignement de l'évolution, l'ouvrage "L'évolution du vivant. Un enseignement à risque?" coordonné par Maryline Coquidé et Stéphane Tirard, Vuibert, 2008. (2) Pour une revue récente des différents "récits" concernant l'anthropogenèse, voir Etienne Bimbenet "L'animal que je ne suis plus", Gallimard, 2011. (3) "La vie, l'évolution et l'histoire", Odile Jacob, 2011, déjà présenté dans cette page.



Quelle que soit la réponse qu'on lui apporte, voilà une question qui fait recette (dans tous les sens du terme). Qui d'entre nous n'a pas fait les frais (bis) d'un livre ou d'une revue rassemblant les contributions de compétences diverses réunies dans un effort de vulgarisation sur le sujet ? Nous y avons sans doute appris beaucoup sur l'application de la cladistique, sur les observations accumulées depuis des dizaines d'années par Jane Goodall et ses successeurs, comme sur les ingénieuses expérimentations des psychologues comparatistes, évolutionnistes, cognitivistes,... Mais qu'avons nous appris sur la science et son fonctionnement ? Enfin sur la vulgarisation et la médiation scientifiques ? C'est ce que l'examen de cette question peut aussi nous révéler. Un singe comme les autres ? La question, toute simple, doit pourtant s'entendre de deux façons distinctes: Tout d'abord (i) notre espèce fait-elle partie de l'évolution biologique, au même titre que les autres singes ? Ensuite (ii) notre espèce possède-t-elle des caractéristiques particulières ? Un "propre de l'homme" existe-t-il ? Ou encore qu'est-ce que l'humain ?

(i) D'où venons nous ? Ce premier aspect ne fait plus discussion depuis bien longtemps. Tout au plus les plus récentes opérations de séquençage de génomes de singes anthropoïdes (dont le "nôtre", donc) ont-elles confirmé les distances entre ces espèces et précisé les dates de leur séparation de leurs ancêtres communs. Cinq à sept millions d'années entre les chimpanzés et les espèces du genre Homo. Davantage avec les gorilles, ce qui fait des chimpanzés les "cousins" évolutifs vivants les plus proches de notre espèce. Bien sûr ces séquençages entrainent de nouvelles interrogations sur la fonction de ces "différences / ressemblances" génétiques mais là n'est pas la question quand il s'agit d'étudier la distance entre espèces. Ici le génome n'est qu'un simple marqueur et seule la nature et la succession des nucléotides des ADN comparés sont utiles, non leur fonction . L'arborescence, ou cladogramme, des relations entre les espèces de la famille des Hominidae ainsi établie n'est pas discutée car en accord avec les informations, notamment anatomiques, fournies par les autres disciplines. Elle est aujourd'hui universellement admise (à l'exception de certains religieux, comme on sait). Même s'ils ne peuvent dessiner un cladogramme précis, à cause des informations fragmentaires fournies par les fossiles, les paléontologues décrivent une "radiation humaine", postérieure à la bifurcation "chimpanzés-hommes", incluant de nombreuses espèces pré-humaines (australopithèques, ...) et au moins cinq espèces d'Homo différentes. De ce buisson évolutif, Homo sapiens reste la seule espèce vivante. Ainsi du point de vue biologique nous ne descendons pas du singe mais nous sommes une espèce de singe. Les découvertes à venir affineront sans doute cette représentation globale mais sans la changer fondamentalement. Ce volet évolutionniste qui répond à la question "d'où venons nous ?" est le plus souvent abordé dans le cadre théorique d'un darwinisme continuiste standard, mais discuté depuis assez longtemps pour ne plus être abordé de manière dogmatique . A ce "détail" près notre origine ne fait plus problème pour les scientifiques d'aujourd'hui: nous somme bien des animaux, des mammifères et des singes et nous pouvons introduire cette vérité scientifique dans nos manuels de SVT.

(ii) Que sommes nous ? Si les évolutionnistes répondent de manière unanime à la question "D'où venons nous ?", qu'en est-il de la question "Que sommes nous ?" qui aborde l'unicité de notre espèce. Le propre de l'homme existe-t-il ? Ou bien sommes nous, simplement, "un singe comme les autres" ? Depuis plusieurs dizaines d'années les éthologistes et les psychologues ont accumulé une somme considérable d'observations sur le comportement des animaux, des primates et des grands singes notamment. La proximité évolutive de ces derniers avec notre espèce est une incitation permanente à la comparaison et les chercheurs ne se sont pas privés, depuis le "rire" (premier propre de l'homme "retrouvé" chez le chimpanzé par Jan Van Hoof), l'utilisation d'outils, la communication, puis la conscience, jusqu'à "la théorie de l'esprit" et, enfin, la morale et la culture .

L'apport essentiel de cet effort est la reconnaissance confirmée des émotions et la découverte d'aptitudes cognitives importantes chez de nombreux animaux autres qu' Homo sapiens et, parmi eux, les grands singes . Mais à analyser cette situation de plus près il s'avère que pour chaque "caractère" étudié les performances animales sont différentes et évoquent plus qu'elles ne se superposent aux performances humaines: outils pas ou peu façonnés, utilisation pauvre (sans syntaxe notamment) des signes appris, reconnaissance de son image (voire simple utilisation du miroir) plus que conscience de soi, manifestations de représentations et d'intentions (voire simples associations) plutôt que conscience de la pensée de l'autre, "traditions" plus que culture "cumulative" (voir plus bas). Certains auteurs (Frans de Waal, Pascal Picq, ...), ne s'arrêtent pas à ces différences. Ils n'hésitent pas à diffuser dans leurs livres et leurs conférences pour le grand public, l'idée d'une économie, d'une morale, d'une politique, d'une culture chez les grands singes, sans considérer l'objection que "cela revient à réduire la culture à la transmission de comportements acquis, la politique à des jeux de pouvoir, la morale à l'empathie et l'économie à la réciprocité" . D'autres, Henri Atlan, Alain Prochiantz, ... qui abordent les êtres vivants comme des "systèmes complexes" s'interrogent plutôt sur les liens et dépendances qui peuvent exister entre les formes humaines de ces "caractères": langage, conscience de soi, de la pensée de l'autre, culture,... "Ainsi, sans anthropocentrisme et sans voir un sens imposé à la vie humaine, qui viendrait d'une Nature intentionnelle ou d'un Dieu nous ayant créés dans un but bien déterminé, nous ne pouvons pas ignorer que l'espèce humaine a évolué avec des dimensions sociales, linguistiques, culturelles, morales et juridiques qui n'existent pas dans la vie d'autres espèces. Il semble bien, en particulier, que les capacités de mémoire du gros cerveau humain, avec celles d'imagination qui en sont le corollaire, soient à l'origine d'un fonctionnement psychique d'une richesse - c'est à dire d'une complexité - que l'on n'observe pas ailleurs et qui permet de s'exprimer dans la multiplicité de ces dimensions. Ce sont des dimensions spécifiques propres à l'espèce humaine,..." écrit Henri Atlan . La découverte récente d'un foyer aménagé datant de plus d'un million d'années, impliquerait que cette invention qu'est la maîtrise du feu ne peut être l'oeuvre d' Homo sapiens mais plutôt d' Homo erectus. Si les conséquences de la conquête du feu sont celles que certains ont déjà imaginé on aurait là un témoignage important "d'une évolution biologique accomplie dans le contexte de l'évolution culturelle". Ceci permettrait de concevoir des hypothèses sur la manière dont divers traits caractéristiques d' Homo sapiens (notre "excédent de cerveau" ou notre si longue ontogenèse) pourraient être associés à l'émergence du propre de l'homme. L'"anature" de l'homme (notre "coupure" d'avec la nature par notre culture) proposée par Alain Prochiantz ou encore "comment l'homme s'est exclu de la nature ?" pour Elisabeth de Fontenay, sont deux manières d'envisager comment les structures nerveuses, les compétences qu'elles révèlent et la culture qu'elles permettent sont aussi associées à l'évolution biologique. Aussi cette perspective constitue-t-elle un vaste programme de recherche. Alors que nous savons "d'où nous venons" nous sommes encore en train de nous interroger en quoi nous sommes (ou pas) différents des autres grands singes. Bruno Latour dirait que la question de nos origines appartient à la "science faite", qui n'est plus discutée, alors que la qualification de notre "humanité" reste du domaine de la recherche, c'est à dire de la "science en train de se faire" celle qui, justement, fait débat. Bien sûr tout le monde (ou à peu près) constate que c'est nous qui questionnons les grands singes et non l'inverse, mais les réponses que nous donnons à ce constat sont encore trop diverses, sans liens et même opposées: des généticiens cherchent toujours s'il existe des gènes, ou associations de gènes, spécifiquement liés au langage humain, des neuro-biologistes remarquent la durée exceptionnelle du développement de notre cerveau et l'abordent comme un système complexe susceptible d' émergences et de propriétés nouvelles, des psychologues et éthologistes comparent nos manières de résoudre des problèmes d'ordre cognitif avec celles des autres espèces (voir plus bas), d'autres étudient l'origine du langage humain (JV), les linguistes soulignent la spécificité de ce langage (JMV). Et la vulgarisation scientifique s'attache, successivement, à la promotion de chaque thèse plus qu'à la présentation de la situation et à son analyse.

(iii) (Re)Médiation scientifique. 
La différence que Bruno Latour nous a appris à faire entre "science faite" et "science en train de se faire" devrait pourtant avoir des conséquences  en matière de médiation et d'éducation  scientifique. En effet on ne peut pas aborder un fait scientifique établi (c'est à dire dépouillé des  principaux enjeux, psychologiques, sociologiques, idéologiques, que ses "fabricants" avaient pu y associer), comme on aborde un sujet de recherche active où tous ces enjeux sont présents et pèsent encore.   

Que cela plaise ou non (aux créationnistes par exemple) notre espèce Homo sapiens fait partie de l'évolution biologique et nous sommes des animaux. Au plan scientifique reposer la question n'a plus de sens. Mais aussi, que cela plaise ou non à certains évolutionnistes, le propre de notre espèce est, aujourd'hui comme jamais, l'objet de recherches multiples, avec des résultats et des interprétations diverses qui ne sont pas encore intégrées dans un ensemble cohérent et organisé. Annoncer frontalement la fin du propre de l'homme permet à coup sûr de faire polémique mais permet tout aussi certainement de perdre de vue les constructions théoriques autres que les projets de réduction de notre espèce à sa biologie et la "sociobiologique" ont suscité depuis les années 1970. Lorsqu'il "réaffirme(r) une fois de plus que les éthologues n'ont pas inventé leurs observations pour contrarier les philosophes, leur seul objectif étant l'avancée des connaissances" , Pascal Picq "oublie" que c'est sans doute la même volonté de faire avancer les connaissances qui suscite la théorisation "des travaux convergents de la biologie, de la psychologie expérimentale, de la neuro-physiologie et de l'éthologie cognitive" par ces philosophes . Lui-même (re)connait assez la particularité du langage humain pour pouvoir imaginer que les études des linguistes ou des philosophes ne sont pas menées pour contrarier les biologistes ou les paléontologues ! En fait oublier de citer certains travaux ou en renvoyer d'autres à une "définition philosophique de l'homme" sans autre forme de procès, font d'avantage penser à certain épisode passé de "la guerre des sciences" qu'à une présentation critique mais plus sereine de la situation .

Bien entendu sur le "front de la recherche" toute question posée peut donner matière à discussion et controverse. Les approches différentes, les résultats qu'elles produisent et les interprétations de ces derniers en sont la matière première. Chaque expérimentation nouvelle y participe. Et sans elle la science n'avancerait pas. Au plan de la médiation scientifique et, encore une fois, quand il s'agit d'essayer de comprendre la "science en train de se faire", c'est cette imparable controverse et ses enjeux qu'il est utile de présenter. Faute de quoi on en reste à une pratique de communication, plus proche de la promotion, voire de la propagande, d'un seul point de vue; on en reste à l'oubli ou, pire, à la disqualification des collègues porteurs d'idées et théories différentes. Examiner les controverses, les hypothèses et les résultats qui animent ce front de recherche c'est, au contraire, repérer les lignes de force qui participent à sa restructuration et sa redéfinition incessante. Depuis les années 1970 Jan Van Hooff a étudié le rire (et le sourire) et son évolution. Beaucoup voient dans ses études une réfutation du vieil adage selon lequel "le rire est le propre de l'homme" (ce que Van Hooff lui-même ne fait pas exactement lorsqu'il note que "finalement seul le rire humain n'est pas toujours drôle"). Plus généralement sa démarche implique la reconnaissance des émotions chez les non humains et, conformément à l'approche éthologique classique, considère leurs expressions comme des universaux spécifiques (c'est à dire, chez notre espèce, indépendants de la culture). Or une équipe internationale de psychologues et neurobiologistes vient justement de montrer que l'expression faciale de nos émotions varie selon nos cultures. Si le rire pas le propre de l'homme, le propre de l'homme (la culture ?) serait présent dans notre rire . Ainsi les résultats modifient l'énoncé même de la question étudiée, ... Et les énoncés ne manquent pas pour désigner le propre de l'homme ! Comme on l'a vu plus haut, rire, outil, langage, conscience, théorie de l'esprit, morale, culture, sont disponibles; prêts à "s'entrechoquer" et jouer chacun pour soi, mais aussi prêts à "collaborer". Par exemple, voir la "théorie de l'esprit" comme condition de la construction de la morale comme le propose Boris Cyrulnik peut participer à une nouvelle définition du propre de l'homme plus "intégrée" qui permettrait de renoncer à des définitions plus (trop ?) simples, comme le rire, voire même l'outil, considérés isolément ? Peut-être est-ce un autre exemple de ce type, qui vient d'être publié à propos de la notion de culture ? Chez Homo sapiens le savoir faire des individus s'additionnerait notamment grâce au langage (les auteurs parlent alors de "culture cumulative") ce qui permettrait à de jeunes enfants de résoudre fréquemment des problèmes là ou des chimpanzés et des singes capucins échouent . Une telle caractéristique (présente dans les techniques puis dans les sciences !) pourrait rendre compte de la divergence entre culture humaine et traditions animales, comme d'autres auteurs le suggèrent déjà , et sortir ainsi de plusieurs décennies d'amalgames très clairement abusifs . Même si les auteurs de cette étude n'abordent que les performances des trois espèces confrontées au même dispositif, ils indiquent comment les enfants coopèrent spontanément, notamment en parlant, au cours de l'épreuve. Ce résultat ramène donc notre attention sur les compétences comme l'attention conjointe et, naturellement, le langage qui apparait au coeur de la question de l'originalité de notre espèce et qui, tout à la fois, permet la culture (mythes, croyances,...) et marque l'influence de celle-ci sur nos comportements. C'est dire toute l'importance que revêt en elle même la question de l'évolution du langage. Nous ne pouvons feindre d'ignorer les hypothèses comme celle de l'origine gestuelle du langage qui permettront, un jour, de raconter dans les manuels scolaires, à la fois notre ancrage dans l'animalité et notre "anature". Il serait vain d'essayer de défendre cette perspective ici mais il est important de noter qu'elle ne pourra sans doute être atteinte sans la participation et l'accord, largement à construire, entre les disciplines allant de la biologie évolutive aux sciences humaines en passant entre autres par la neurobiologie. Le dernier livre de Michel Morange ne dit rien d'autre 2. A force de discussions, de nouvelles hypothèses, de nouvelles observations et expériences, de nouveaux résultats sont sans cesse produits, qu'il faut bien intégrer et qui changent la donne. Non par compromis, la science n'est pas démocratique , mais par cette forme d'entrainement et de ralliement qu'un fait nouveau, "un évènement de raison" aurait dit Bachelard, opère autour de lui. La (re)médiation scientifique qui découle de tout ceci est celle du passage de la communication scientifique, promotionnelle, partielle et partiale, à une description plus complète sur la manière dont fonctionne la recherche, sur ses luttes, plus ou moins "scientifiques", sur ses incertitudes comme sur ses "réussites" , sur ses prétentions (penser aux annonces déçues) comme sur ses apports réels. Au plan pratique, comme j'essaie de le faire ici, il s'agit d'utiliser les ressources (notes, conférences, projets de recherche, blogs) que les chercheurs, critiques, médiateurs et autres passeurs de sciences d'aujourd'hui, mettent directement à notre disposition sur le net. Et la question du "propre de l'homme", choisie comme exemple et qui, comme toute question "ouverte ", sera discutée aussi longtemps qu'on aura pas compris comment il a émergé ? Darwin a écrit " Je n’admettrai jamais que l’homme, sous prétexte qu’il y a un abîme entre lui et les animaux, a une origine différente" . Plus de cent ans après, cette origine commune est acceptée de tous. Reste l'abîme. On peut bien sûr le nier, ou l'escamoter en s'appuyant sur un continuisme et un biologisme étroits. Mais on peut aussi l'affronter, quitte à accepter l'idée que la théorie de l'évolution peut être améliorée, quitte à prendre en considération les approches nouvelles de la biologie (théorie des systèmes complexes, auto-organisation, ...), ou des sciences humaines (naturalisation de l'esprit) quitte, enfin, à considérer les possibilités d'une inter ou trans disciplinarité entre sciences "dures" et les sciences ... humaines.

Un "aveu" pour un appel (mai 2012)

Dans les 90, alors que j'étais animateur des enseignements transversaux (histoire, sociologie, épistémologie, ...) de l'école doctorale Vie-Agro-Santé de Rennes, j'avais remarqué avec stupeur que nos collègues de Sciences-Eco lançaient des initiations à la gestion de porte-feuilles boursiers ! La promotion, sans aucune précaution d'ordre éthique apparente, d'une activité destinée avant tout à apprendre à "faire de l'argent", m'était apparue alors comme aberrante dans le cadre d'une formation et institution universitaire. Mon premier mouvement fût d'interpeller cette initiative, mais je n'ai rien dit ...

"L'appel pour une sortie de crise par l'écologie" publié ce jour même (23 mai 2012) dans le Huffington Post, me donne l'occasion de couper mon silence.

Je partage l'essentiel de son contenu et tout particulièrement ses deux derniers points qui concernent l'enseignement et l'éducation. Je salue les collègues signataires de cet appel qui attirent notre attention sur l'essentiel. A titre individuel, mais d'abord comme citoyen et militant "éducation populaire", je demande à mon tour de diffuser et discuter cet appel.

Cultures et Emotions (mai2012)

On disait depuis Darwin que les expressions faciales de nos émotions (joie, surprise, peur, dégoût,...) étaient universelles et transculturelles. Il n'en est rien, nos émotions et leurs expressions sur nos visages diffèrent selon nos cultures révèlent les chercheurs dans un article publié ce mois dans la revue PNAS (Jack et al. Facial expressions of emotions are not culturally inuversal). Un nouvel élément en faveur de l'idée que nous ne sommes pas vraiment des singes comme les autres !! Nous y reviendrons.

L'homme (Homo), un singe comme les autres ? (avril 2012)

Cette question peut s'entendre de deux façons: (i) Notre espèce fait-elle partie de l'évolution biologique, au-même titre que les autre singes ? (ii) Notre espèce possède-t-elle des caractères particuliers ? c'est à dire, existe-t-il un "propre de l'homme" ?

La deuxième de ces questions reste ouverte dans la communauté évolutionniste, dans la mesure où ce "propre de l'homme" fait encore débat aujourd'hui. (voir ci-dessous l'instinct entre éthologie et évolution). Nous savons dire d'"où nous venons" mais nous ne sommes pas encore d'accord sur ce que "nous sommes", sur ce qui fait que nous sommes humains.

Mais des chercheurs y travaillent comme le montrent ces Articles marquants dans le Science du 2 mars 2012

Article n°17 : « Identification of the Social and Cognitive Processes Underlying Human Cumulative Culture » par L.G. Dean et K.N. Laland de l'Université de St. Andrews à St. Andrews, Royaume-Uni ; R.L. Kendal de l'Université de Durham à Durham, Royaume-Uni ; S.J. Schapiro du M. D. Anderson Cancer Center de l'Université du Texas, Bastrop, TX ; B. Thierry de l'Université de Strasbourg à Strasbourg, France.

Les jeunes enfants partagent leurs connaissances contrairement au chimpanzé. De jeunes enfants qui tentent de trouver la solution d'un jeu collaborent et partagent leurs informations alors que les chimpanzés et les singes capucins ne le font pas pour le même jeu indique une nouvelle étude. Ce résultat aide à comprendre pourquoi les êtres humains sont apparemment uniques dans leur capacité à accumuler des connaissances culturelles avec le temps. Les autres animaux peuvent bien apprendre des autres pourtant la culture humaine est la seule à s'être complexifiée avec le temps. Les chercheurs se demandaient quelles capacités cognitives ou conditions sociales étaient requises pour avoir cette « culture cumulative ». Lewis Dean et ses collègues ont testé diverses hypothèses sur des enfants de 3-4 ans, des chimpanzés et des singes capucins. Ceux-ci avaient affaire à un jeu avec une sorte de boîte qui donnait des bonbons après trois étapes de plus en plus difficiles où il fallait deviner comment manipuler correctement ses compartiments. Les enfants ont nettement mieux réussi à atteindre les dernières étapes. Leur succès était lié à une succession de processus socio-cognitifs dont l'enseignement par des instructions verbales, l'imitation et la prosociabilité (par exemple le partage des bonbons). Les chercheurs en concluent que cet ensemble de processus est déterminant pour le développement de la culture cumulative. Robert Kurzban et H. Clark Barrett commentent en détail ce travail dans un article Perspective associé.

Article n°4 : « Origins of Cumulative Culture » par R. Kurzban de l'Université de Pennsylvanie à Philadelphie, PA ; H.C. Barrett de l'Université de Californie, Los Angeles à Los Angeles, CA.

Une mise en perspective de ces articles est en préparation.

Et à relire (mars 2012

"La vie, l'évolution et l'histoire" de Michel Morange est un de ces livres qui peuvent passer inaperçus à leur publication mais sur lesquels on revient, immanquablement. A commencer, on l'espère, par l'auteur lui-même. Biologiste moléculaire et cellulaire, historien de la biologie, Michel Morange possède les clefs qui permettent de comprendre la biologie actuelle, c'est à dire "la biologie en train de se faire": La fin du tout génétique ? certes; la critique et l'abandon du réductionnisme ontologique ? bien entendu; mais, au delà, le rapprochement, la discussion, l'intégration à venir(?) entre les disciplines qui jusqu'ici ne s'occupaient, à peu près, que des mécanismes (analyse des causes proximales des phénomènes biologiques, les "comment ?") et ce celles "qui prétend(ent) rendre compte de leur existence par des explications évolutionnistes" (analyse des causes "finales", les "pourquoi ?", comme on dit). Comme souvent on trouvera des précurseurs (Michel Morange en cite plusieurs) mais le point est ici de montrer comment ces deux "pans" de la biologie commencent à réfléchir sur ce que fait l'autre, voire à prendre à son compte les questions de l'autre. On doit prendre cette ouverture comme un progrès, même s'il ne se fera sans doute pas sans quelques incompréhensions ni quelques disputes. Ce qui est nouveau, rafraichissant, utile, est de voir un chercheur interroger, de longue date, sa propre discipline, en repérer les limites et pointer ainsi les questions sur lesquelles elle reste peu efficace ( voir sa conférence "l'homme et le singe" par exemple ). Ceci lui permet d'interpeller efficacement les autres disciplines, celles qui traitent de l'évolution, sur leur "naïveté", sans être soupçonné d'anti-darwinisme. Raconter des histoires (telling stories) avec des modèles abstraits n'est pas encore reconstituer l'histoire (history) évolutive, ni des traits particuliers des espèces, ni des espèces elles-mêmes, reprend en substance Michel Morange. Publié en 2011, après l'année Darwin, cet ouvrage témoigne au passage des frustrations que cette célébration a nourries. Occupés à la dénonciation de "l'ennemi extérieur" (le créationnisme) trop d'évolutionnistes ont adopté la posture très "politiquement correcte" d'y présenter le néo-darwinisme comme si tout y était résolu, alors que tant de points y demeurent en discussion. Le caractère continu ou discontinu de l'évolution des espèces, par exemple, n'est pas le moindre et interroge l'anthropogenèse elle même,... Mais Michel Morange n'en reste pas à ces manques, il décortique des exemples et il attire très heureusement notre attention et notre envie sur ... ce qui va suivre.

A lire, absolument (janvier 2012)

C'est un (petit) livre d'apparence très banale. Il parle (une nouvelle fois) d'évolution, ou plutôt d'histoire(s) de la vie. Son titre "La vie, l'évolution et l'histoire". Pourtant le nom de son auteur parle à qui suit l'histoire de la biologie moderne: Michel Morange. Et la qualité de ses livres précédents oblige à regarder la quatrième de couverture de son petit dernier:

"... Cet ouvrage met au jour la convergence nouvelle qui semble apparaître entre les deux grands pans de la biologie, celui qui se concentre sur les mécanismes et celui qui prétend rendre compte de leur existence par des explications évolutionnistes. Il en sort ainsi une vision nouvelle du vivant,... "

J'ai donc commencé cette année 2012 avec ce livre, en enviant tous les étudiants et chercheurs qui vont pouvoir se saisir des idées qu'il contient; en râlant sur moi-même d'avoir perdu presque un an avant de l'avoir trouvé (publié en février 2011 chez Odile Jacob).

J'en parle ici, car la grille de lecture de la biologie qu'il donne va servir quelques années,.. Si vous êtes amateur de biologie, biologiste amateur, "ptit deb", etc. J'en parle ici aussi comme ancien éthologiste qui a appelé longtemps (assez vainement je dois dire) le rapprochement entre "éthologie causale" , l'étude des "comment", et ce qu'on nomme aujourd'hui "l'écologie comportementale" qui aborde la question des "pourquoi" et l'évolution des comportements. (voir plus bas "l'instinct entre éthologie et évolution"). Est-ce pourquoi je trouve que ce livre est un des meilleurs que Michel Morange ait écrit ?

"COGITAMUS" (septembre 2011)

Sous ce titre (alléchant pour certains mais qui peuvent en effrayer d'autres) se cache un parfait petit manuel pour "petit débrouillard" et pour toute personne pour qui  ?=+. Son auteur Bruno Latour, anthropologue et sociologue des sciences, y livre les techniques, méthodes et concepts dont il se sert pour débrouiller la vie des sciences et leurs productions et naturellement analyser les controverses scientifiques. C'est un cours, car ici Bruno Latour est d'abord enseignant. Mais, présenté sous la forme de six lettres envoyées à une étudiante, c'est un cours vivant, accessible et efficace; bref un cours comme on aimerait en recevoir souvent. En cette rentrée de septembre c'est un cadeau pour qui s'intéresse à la culture scientifique et la "mise en démocratie" des sciences. Ce livre nous devrions le lire et le discuter afin, à notre tour, d'en faire profiter le plus grand nombre (chose faite en octobre à la "discu-science" organisée par Max, merci à lui).

"QI, histoire d'une imposture" (été 2011)

Un documentaire à voir ! (diffusion sur france 5 et août 2011 sur le web) Indisponible en ce moment (novembre 2011) on peut toutefois obtenir des informations sur son contenu.

Une excellente introduction pour une approche moderne de la discussion inné-acquis (voir ci-dessous) et une réponse à mon interlocuteur de "science et morale" (voir plus bas).

L'histoire du QI: de son utilisation eugéniste, des fraudes scientifiques "commises en son nom", en passant par son utilisation mercantile grand public, jusqu'à sa conception et utilisation actuelles, ...

Ca donne envie, entre autres choses, de (re)lire l'histoire de "la mal-mesure de l'homme" (un des grands livres de S. Gould) et repenser aux aberrations scientistes et à leurs séquelles,... Si vous en connaissez n'hésitez pas à les signaler dans la discussion de cette page.

L'inné et l'acquis (2011)

Voir l'article ici : L'inné et l'acquis Nouveau chantier donc que je compte alimenter ces jours prochains. Encore une fois, s'il vous intéresse n'hésitez pas à intervenir dès maintenant dans la page de discussion afin que vos interrogations soient prises en compte.

Science et Morale; quelques questions-réponses (2011)

En marge de l'évocation de l'éthologie lorenzienne dans ses rapports avec l'eugénisme d'une part et l'idéologie nationale-socialiste d'autre part, voici quelques questions-réponses qui abordent les relations entre science et morale. Les "questions" de mon interlocuteur sont "en italique". Science et morale

Konrad Lorenz et le National Socialisme (2011)

Dans le texte précédent, consacré à l'instinct, j'ai mentionné au passage la dimension idéologique des théories de Lorenz. J'essaie ici de réparer ce manque après avoir constaté que Wikipedia (édition française) restait particulièrement pauvre sur le sujet alors que plusieurs historiens des sciences ont énormément apporté depuis les années 1970. Ceci est donc une tentative de présentation de ces travaux. Cette version reste en révision. Konrad Lorenz et le National Socialisme: De la controverse à l'histoire des sciences

L'instinct: entre éthologie et évolution (2010)

Constatant que cette page est visitée, j'ai entrepris d'expliciter le petit texte qui précède. Ceci m'a amené à parler "éthologie" et "évolution" plus que je ne l'aurais pensé et à rappeler quelques discussions importantes, ignorées du grand public et quelquefois oubliées par les biologistes.

Ici la dernière mise à jour (janvier 2012).

Je remercie tous les collègues qui m'ont nourri de leurs textes, conférences et suggestions. Tout particulièrement Jacques Gervet et Jean-Marie Vidal qui m'ont, durant l'année 2009, associé à leur discussion "informeltique" sur le thème de l'évolution de l'espèce humaine. Pour une version précédente (septembre 2010) de ce texte cliquer ici (il s'agit d'un PDF)

L'instinct maternel existe-t-il ? (2010)

Les déclarations récentes d'Elisabeth Badinter à propos des conduites maternantes chez les femmes ont suscité de nombreuses réactions, souvent négatives, et la primatologue Sarah Hrdy, auteur d'une somme sur ce qu'il est convenu d'appeler "les instincts maternels", a même été convoquée pour dire ce qu'elle en pensait,... Ouvrir la page: L'instinct maternel existe-t-il ?

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Inauguration du premier "débrouillobus", Brest 2001; Depuis l'APDB anime deux autres laboratoires mobiles.

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